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Sorties > Mont Blanc > Mont Blanc, Par les Grands Mulets

Mont Blanc, Par les Grands Mulets

Massif : Mont Blanc
Départ : Chamonix (Tunnel du Mont-Blanc) (1230 m)

Topo associé : Mont Blanc, Par les Grands Mulets

Sommet associé : Mont Blanc (4810 m)

Orientation : NW

Dénivelé : 3950 m.
Ski : 3.1

Sortie du mardi 4 juin 2013

duve

Conditions nivologiques, accès & météo

Excellente
Etat de la route : Altitude du parking :

Altitude de chaussage (montée) : 1900m
Altitude de déchaussage (descente) :1900m

Activité avalancheuse observée : Ponts de neige fragiles au retour dans le secteur de la jonction.

Skiabilité : 😟 Médiocre

Compte rendu

Chamonix/Jonction/Grands Mulets/Vallot/Mont Blanc/Chamonix
MONT BLANC EXPRESS, le récit d'un MARATHON DES CIMES...

Coup d'œil dans le rétroviseur pour revenir sur mon aller/retour CHAMONIX-MONT BLANC, le 04/06/2013.
Participants : DURAND Bruno, DUVERNEY-PRÊT Serge.

LE PROJET.
Le Mont Blanc se gravit normalement en 2 étapes. Le 1er jour, depuis Chamonix (1035m), les alpinistes prennent la cabine du téléphérique de l'Aiguille du Midi jusqu'au plan de l'aiguille, 2300m d'altitude, fin du premier tronçon et point de départ de l'itinéraire hivernal. Là débute leur ascension qui les mènera au refuge des Grands Mulets où ils passeront la nuit. Le 2ème jour, les candidats au sommet s'élanceront alors du refuge pour réaliser le rêve d'une vie : gravir le toit de l'Europe.
Notre objectif : réaliser en aller-retour dans la journée, par nos propres moyens, l'ascension du MONT BLANC depuis le centre de Chamonix. Il s'agit donc de relier d'un trait ces 2 points géographiques sans emprunter la benne du téléphérique qui dépose les alpinistes à la gare intermédiaire. Cette télétransportation leur permet de passer en quelques minutes du bitume à la neige, de changer de planète en un temps record, de quitter le parking pour rejoindre rapidement le monde des glaces. Chaque année, le téléphérique de l'Aiguille du Midi transporte près de 500 000 touristes, skieurs ou alpinistes.
Nous ne profiterons pas non plus du repos procuré par une nuit au refuge, ni du ravitaillement réconfortant qu'offre une belle assiette de charcuterie le soir venu. Nous ferons donc le Mont Blanc "à l'ancienne", en partant du centre du village où trône la statue des pionniers Balmat et Paccard. Ces 4000m de dénivelés seront réalisés en complète autonomie avec nos seules jambes comme moyen de locomotion. Vitesse et endurance, ce sont les deux conditions que nous devrons réunir pour relever ce défi en tenant compte de paramètres tels que l'altitude et les dangers liés à la haute montagne.
Nous échangeons des points de vue avec Bruno, discutons du matériel mais aucune date précise n'est encore fixée.

QUELQUES HEURES AVANT LE DÉPART.
Lundi 3 juin, midi : je reçois un coup de fil inattendu de Bruno qui a consulté le bulletin météo et le gardien du refuge des Grands Mulets. Les conditions sont plutôt bonnes, la montagne semble vouloir nous accueillir : "c'est le moment", il me propose de partir cette nuit... Le doute s'installe, je n'ai pas récupéré physiquement du trail de l'Albarine effectué la veille en Maurienne. Faut-il renoncer à cet ambitieux projet par peur de l'échec? L'enneigement est encore suffisant mais la saison hivernale touche à sa fin. Il faut se décider maintenant, le temps tourne comme tourne la chance. "On a jamais plus de chances de réussir que lorsqu'on fait tout ce qu'il faut pour la réussite." C'est décidé, à nous l'aventure...
Il ne nous reste que quelques heures pour les préparatifs. La rapidité de notre progression sera la clé du succès, cette ascension nécessite donc un équipement léger. Néanmoins, la haute montagne impose certaines règles que Bruno, en homme d'expérience, n'hésite pas à me rappeler : outre le matériel habituel, crampons, casque, baudrier, piolet, broches, mousquetons, corde et vêtements chauds composeront le packtage sans oublier aliments et boissons énergétiques. Après avoir longuement vérifié mon "barda", je me rends à mon travail en début d'après midi. Bruno me récupère à Annecy où je finis mon service vers 22h00 et nous prenons aussitôt la direction de la capitale mondiale de l'alpinisme. En voiture, il m'avoue avoir tourné tel un lion en cage ces dernières heures. Quant à moi, les cafés précédents et la pensée des heures à venir m'ont remonté comme une pendule dont le mécanisme ne demande qu'à accélérer le mouvement.

L'ASCENSION.
Chamonix, mardi 4 juin, 00h30 : nous sommes prêts, skis, chaussures et sac à dos chargés sur l'épaule. Traverser ainsi les rues désertes de Chamonix au beau milieu de la nuit est un peu irréel. C'est donc chaussés de nos baskets que nous longeons la route d'accès au tunnel pour pénétrer ensuite une forêt à la végétation dense. La lueur de nos lampes frontales nous permet de suivre le long sentier et de remonter la pente pour atteindre l'altitude de 1900m. Il s'agit du chemin de l'ancien téléphérique. Plus haut, les arbres se font rares, le terrain devient enneigé, propice à l'utilisation de nos skis de randonnée. Nous abandonnons donc nos baskets sur une branche, en espérant les retrouver dans quelques heures, pour enfiler nos chaussures de ski. La progression à skis est toujours plus agréable, le regel est excellent, les peaux de "phoque" permettent aisément la remontée du terrain à contre courant de la gravité. Nous évoluons libres dans un espace sauvage, les cristaux de neige scintillent dans le faisceau lumineux de nos frontales et une belle nuit étoilée nous accompagne.
Altitude 2500m : un long faux plat nous amène au glacier des Bossons, véritable colosse qui nous écrase de toute sa masse. Il faut le traverser sous les séracs. C'est le délicat secteur de la Jonction, cadre idyllique mais qui peut s'avérer dangereux car il s'agit d'un champ crevassé en perpétuel mouvement qui nécessite donc un minimum de prudence. Nous surveillons les séracs qui nous dominent. Ces géants représentent de véritables œuvres dans un musée en pleine nature. Grâce au halo de nos lampes, nous découvrons un univers blanc et tourmenté, une mer de glace déchaînée qui se serait soudainement figée. L'ascension reprend vers le refuge des Grands Mulets. Le rythme est soutenu.
Altitude 3050m, refuge des Grands Mulets, 5h00 : je suis impressionné à la vue de ce refuge posé sur un piton rocheux. Les toilettes surplombent le vide par manque d'espace. Nous avalons une barre énergétique en observant, plus haut, des lueurs dans la nuit. Ce sont les "frontales" des alpinistes partis, depuis le refuge, à l'assaut de ce sommet tant convoité. Nous enchaînons, toujours skis aux pieds, en direction de l'arête Nord du dôme du Goûter.
Altitude 3500m, la déclivité du terrain augmente, les peaux des skis ne suffisent plus à nous retenir sur cette forte pente. L'utilisation momentanée des crampons sous nos chaussures est nécessaire pour continuer la progression, skis sur le sac à dos. Les premières lueurs du jour apparaissent, le soleil franchit bientôt l'horizon pour commencer sa course, les sommets s'embrasent, les couleurs chaudes sont superbes : le lever de soleil restera un moment magique, inoubliable.
Altitude 4000m, sous le dôme du Goûter : nous effectuons une petite pause pour ingurgiter un gel. A partir de cette altitude, les effets du manque d'oxygène dans l'organisme provoquent vertiges et maux de tête. Nous poursuivons péniblement notre périple vers le refuge Vallot.
Altitude 4360m, refuge Vallot : il s'agit en fait d'un bivouac pour les alpinistes en détresse, le confort est spartiate mais nous n'avons nullement l'intention de nous y attarder. Juste le temps de laisser nos skis et de fixer les crampons afin de pouvoir évoluer sur l'arête des Bosses, dernier obstacle. Nous ôtons nos gants pour effectuer cette manipulation délicate et dévoreuse d'énergie à plus de 4000m. Mains nues, les gestes sont plus précis et plus rapides. C'est une erreur! Malgré une météo clémente, le froid vif représente un danger à cette altitude. Nos mains sont d'abord engourdies puis l'engelure menace l'extrémité des doigts. Cette brûlure par le froid peut provoquer de sévères lésions en cas d'exposition prolongée à des températures fortement négatives. Vite, il est indispensable de remettre les gants et de réchauffer nos mains.
Après ce contre-temps, pointes aux pieds, nous repartons pour emprunter l'étroite arête des Bosses qui nous mènera au sommet. Ici, le faux pas est interdit, la chute serait vertigineuse. C'est donc avec concentration que nous cramponnons la neige gelée. Ne nous précipitons pas, restons lucides malgré l'ivresse de l'altitude et la victoire si proche désormais. La progression a été rapide cette nuit, les efforts fournis les heures précédentes et le mal des montagnes font ralentir le pas. Le souffle court, nous atteignons le point culminant du Mont Blanc à 9h30.

LE SOMMET.
MONT BLANC, 4810m, 9h30 : Moment d'émotion, mélange de fierté et de bonheur. Je garde en mémoire la joie de Bruno, la mienne est gâchée par ce fichu mal de crâne, aussi tenace qu'un mauriennais. Je réalise malgré tout la chance que nous avons : notre 1ère tentative en aller/retour au sommet du toit de l'Europe, en partant de Chamonix et sans assistance, est couronnée de succès. Les risques d'échecs étaient nombreux. Bruno est l'initiateur de ce projet un peu fou par sa dimension physique et morale. Sa connaissance du terrain est rassurante et son expérience de la haute montagne un atout.
Les conditions climatiques idéales et notamment l'absence de vent nous autorisent à profiter du panorama. A cet instant précis, on voudrait que le temps s'arrête afin de profiter au maximum du moment présent. Le Mont Blanc reste le roi des Alpes, il trône fièrement au dessus des cimes voisines que nous dominons du haut de nos 4810m. Impressionnant 360°, le paysage est somptueux, aucune barrière naturelle ne vient entraver notre champ de vision. Un désert blanc immaculé s'étend à perte de vue. Plus bas, au pied du géant, la maquette de Chamonix en modèle très réduit, s'expose.
Un bourdonnement interrompt notre contemplation : au loin, un insecte fonce droit sur nous. En se rapprochant, la guêpe change de taille, elle prend l'apparence d'un objet volant bientôt identifié comme un hélicoptère. C'est celui du PGHM de Chamonix. Il est maintenant tout proche et, à travers la bulle du poste de pilotage, nous distinguons nettement le pouce levé du co-pilote en guise de félicitations. Lors de leurs multiples survols du Mont Blanc, les militaires adressent ce geste de bienveillance à l'égard des alpinistes.
Mais le spectacle touche à sa fin, il est temps de quitter notre promontoire, de descendre de notre nuage, car n'oublions pas qu'il nous faut retourner à Chamonix, notre point de départ et toujours sans l'aide du téléphérique. Le mal aigu des montagnes, appelé "MAM", qui aurait pu faire échouer notre ascension, me fait souffrir. J'ai la sensation que mon cerveau est "compressé".

LA DESCENTE.
De retour à l'abri Vallot, nous chaussons les skis pour effectuer une descente éprouvante. Les cuisses brûlent, les organismes sont fatigués, ils ont été mis à rude épreuve. Je suis bon skieur et j'éprouve pourtant des difficultés à enchaîner 2 virages successifs. Retour à la Jonction où l'on s'encorde pour passer un pont de neige.
Altitude 2000m : nous cherchons le chemin qui pénètre dans la forêt et nous ramènera à bon port. Nous buttons sur une barre rocheuse. Que faire? Soudain, en levant la tête, nous apercevons un parapentiste. Depuis son aile volante, il possède un énorme avantage, sa vision du terrain est totale, il peut cartographier le secteur : nous sommes descendus trop bas. Il sera notre guide en nous montrant la bonne piste un peu plus au Nord. Toutefois, le passage nécessite de remonter une courte mais difficile pente constituée de vernes et d'arbrisseaux. Il est 13h, la neige ramollie par le soleil à cette heure de la journée ne porte plus et nous enfonçons jusqu'à mi-cuisses. Rien ne nous est épargné aujourd'hui, cette erreur de parcours ne figurait pas dans le scénario initial du film. Tant pis, il est désormais écrit dans le script que nous boirons le calice jusqu'à la lie...
Nous retrouvons finalement nos baskets. En pénétrant dans la forêt, le monde minéral des montagnes cède la place au monde végétal. Le chemin emprunté cette nuit rassure car, contrairement à la haute montagne, c'est un terrain balisé, sans piège. Bruno trouve encore des ressources pour descendre comme un chamois (un chamois un peu fatigué quand même). Je le suis péniblement, j'ai moins bien encaissé la somme d'efforts qu'a représenté notre folle randonnée et notre nuit sans sommeil. Cette descente en forêt est interminable, j'ai hâte que notre périple s'achève. Malgré la fatigue, apprécions la sérénité et la paix que procurent ces bois. En les quittant, une surprise nous attend...

RETOUR BRUTAL À LA CIVILISATION.
En effet, le bruit des poids lourds nous ramène soudainement dans un tout autre environnement. Je découvre cette file de camions empruntant les lacets de la route menant au tunnel du Mont Blanc. C'est un contraste saisissant avec le fabuleux décor qui nous a accompagné jusque-là. Nous longeons un moment ce serpent bitumineux et j'ai encore en mémoire le regard incrédule des chauffeurs qui nous dévisagent, chargés de tout notre attirail. "D'où viennent-ils ces voyageurs d'un autre temps avec leurs skis et leurs chaussures sur les épaules?" doivent-ils se demander.
Puis nous prenons la direction de Chamonix. Un pas après l'autre, tels des automates, cette marche sera notre ultime épreuve. Notre réserve d'énergie est épuisée, les voyants clignotent au rouge...
Chamonix, 14h30 : Nous entrons à présent dans la ville pour constater que les rues se sont animées depuis cette nuit. Ce voyage hors du commun prend fin au terme de 14 heures d'endurance et de volonté. On se congratule mutuellement avec Bruno.
NOUS L'AVONS FAIT ! Notre MONT-BLANC EXPRESS est une réussite.
Cette épopée sera immortalisée par une photographie au pied de la statue de Balmat et Paccard, point de départ et d'arrivée de notre marathon des cimes. En ayant gravi le Mont Blanc de cette manière, notre courage n'égale pas celui de ces pionniers de l'alpinisme, loin de là, mais nous avons marché sur leurs pas en respectant la même éthique et l'itinéraire historique.

ÉPILOGUE.
Chaque année, 2000 à 3000 téméraires parviennent au sommet du toit de l'Europe. Alors, facile le Mont-Blanc? Non, il ne faut pas sous estimer cette course réellement longue même lorsqu'elle s'effectue de manière traditionnelle en deux jours. Si la nuit au refuge améliore l'acclimatation et permet d'être moins exposé au mal aigu des montagnes, les effets de l'altitude sur l'organisme restent redoutables. Preuves de cette difficulté, 30% des alpinistes présentent des blessures (gelures, troubles liés à l'altitude, blessures par crampons) lors de leur retour au refuge. En 2006, sur les 120 interventions du PGHM au Mont-Blanc, 80% étaient dues à l'épuisement ou au manque de préparation physique des candidats. Le taux de réussite est de 33% seulement sans l'aide d'un professionnel, 50% avec un guide.
Dernier facteur qui conditionne le bon déroulement de l'ascension : la météo. En cas de dégradation des conditions climatiques, rebrousser chemin est impératif.
De nombreux "obstacles" jalonnent donc ce parcours mais notre MONT-BLANC EXPRESS lui, n'a pas déraillé. Il a déposé ses 2 intrépides voyageurs tout en haut de la montagne pour les ramener ensuite en bonne santé à Chamonix, sa gare d'attache.
Pour Bruno, il s'agissait de son 6ème Mont Blanc, le 1er dans ces conditions.
Pour moi, c'était ma 1ère rencontre avec le géant des alpes. J'aimerais faire plus ample connaissance avec lui...

Serge DUVERNEY PRÊT.

Le soleil franchit bientôt les crêtes pour commencer sa course. La boule de feu se donne en spectacle, nous sommes aux premières loges.
Le soleil franchit bientôt les crêtes pour commencer sa course. La boule de feu se donne en spectacle, nous sommes aux premières loges.
Photo tirée du site pour montrer l'itinéraire.
Photo tirée du site pour montrer l'itinéraire.

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