Départ : Villar d'Arêne (Pont d'Arsine) (1667 m)
Topo associé : Grande Ruine, Voie normale
Sommet associé : Grande Ruine (3765 m)
Orientation : SE
Dénivelé : 4200 m.
Ski : 3.2
Sortie du lundi 13 avril 2015
Conditions nivologiques, accès & météo
Généralement beau temps.
Vendredi avec vent du sud.
Samedi, couverture nuageuse partielle l'après-midi.
Dimanche, quelques nuages en fin d'après-midi.
Lundi, grand beau.Etat de la route : dégagée.
Altitude du parking : 1600
Généralement de la neige de printemps, dure à gelée le matin, transformée ensuite.
Sauf en versant N (Galibier) ou NE (Fontanil) : poudre tassée.
Altitude de chaussage (montée) : 1800
Altitude de déchaussage (descente) : 2000
Activité avalancheuse observée : aucune
Skiabilité : 😄 Excellente
Compte rendu
Avec Didier, Gilles, Hervé, Olivier, Patrick
Pas facile de rassembler un groupe venant de Chalon sur Saône, Paris, Lyon, Marseille, Chamonix et Toulouse. Le puzzle se construit par étapes.
Vendredi, journée de transition en attendant l’arrivée du petit dernier.
Paradoxalement, notre séjour a commencé par nous éloigner de la Romanche, comme pour mieux prendre notre élan.
Depuis les Sestrières en dessous-du col du Lautaret, nous avons remonté le clot Julien avec nos skis sur le dos sur une neige bien portante. Petit détour à la Pointe de la Mandette qui nous permet de deviner notre itinéraire pour les 3 prochains jours : les Combeynots derrière lesquels nous randonnerons demain, la haute Romanche jusqu’à Valfourche et le cirque glaciaire de la Plate des Agneaux. Pour nous mettre en jambes (et nous tester) sur tous les types de neige, Didier nous fait descendre versant Valloire dans une poudre tassée puis remonter au Petit Galibier. Ensuite, descente sur une neige de printemps de plus en plus souple jusqu’au cul de la voiture. Retour au fameux gîte du Pas de l’Ane pour un repas toujours aussi bon pour fêter l’arrivée de Patrick et saluer Gilles qui nous quitte demain.
Samedi, le chemin des écoliers.
Nous prenons la voiture jusqu’au Lauzet. Les skis sur le dos, nous remontons l’aimable vallon du Fontenil. D’abord dans les odeurs résinées d’un mélézin qui s’éveille au printemps, puis par les lents moutonnements neigeux qui mènent au ressaut du lac de Combeynot que nous surplombons en contournant la Tête du Vallon par sa base. La pente finale pour accéder au col du Fontenil, raide, démarre dans 10 cm de poudre sur fond dur qui nous obligent à mettre les skis sur le dos. Nous basculons alors du décor de pâturages et de mélèzes de la haute Guisane dans l’univers minéral, glaciaire et vertical des Ecrins. Les 300 premiers mètres de descente sont un régal et par un choix astucieux d’itinéraire, Didier nous fait descendre skis aux pieds jusqu’au refuge de l’Alpe de Villar d’Arêne.
Après-midi à buller au soleil et en confidences post-siestales. Bon repas (nos compagnons de table nous offrent un génépi maison) et nuit tranquille.
Dimanche, nous sommes tout petits.
Lever aux matines même si la journée sera courte. Après une rapide descente, nous enquillons le Plan de l'Alpe avec les skis sur le dos. Les Cavales dorées par le soleil naissant se reflètent dans la Romanche. Après Valfourche, les quelques ondulations du terrain rompent la monotonie du crissement des vibram dans la neige gelée. Un laquet opale émerge de la neige. La muraille en rive droite nous écrase mais nous attire aussi avec ses couloirs de toute beauté. Après le coude de la vallée, des canoles sur notre droite nous invitent à rejoindre la Plate des Agneaux. Montée rude à pied, que le soleil rend un peu plus pénible : nous comprenons pourquoi nous sommes partis à 7h. Passés les 2 'tubos' (comme disent les espagnols), un bombement rocheux nous invite à une collation méritée. Nous retrouvons le sourire. En poursuivant la montée, nous nous ouvrons le paysage mais tous les sommets environnants semblent croître pareillement. Enfin à midi nous arrivons à Adèle Planchard. Accueil souriant. Nous sommes les premiers arrivants. Un coca, quelques grignotis, une bière : « y sem bè » comme on dit en Catalogne. Siestes, discussions tranquilles, récapitulatif sur les différentes neiges rencontrées et leur implication sur les choix d'itinéraire des 3 derniers jours. Très bon repas et liqueur de fleurs de mélèze. Que demander de plus ?
Lundi, dégustation.
Réveil 5h. Après le petit déj', il y a embouteillage dans le sas pour s'équiper. Les frontales zigzaguent sur le glacier supérieur des Agneaux. Une bande orangée s'étire sur la plaine du Pô. Petit à petit, le disque solaire s'extirpe des brumes matinales. Le granit, naturellement coloré, en rosit de plaisir. Vers 3400m, nous creusons un trou auquel nous confions quelques affaires superflues pour monter au sommet. Et là, je joue à la niquedouille : mes crampons dans leur housse m'échappent des mains et s'escampent dans la pente ; un léger replat me donne un léger espoir d'arrêt inespéré … mais vain puisqu'ils continuent leur glissade. Tant pis, je m'arrêterai à la brèche Giraud-Lézin. Trente minutes plus tard, Didier me redonne le moral en me proposant de faire plusieurs allers-retours au sommet pour que je monte avec les crampons de Patrick. Merci Didier ! Du haut du sommet de la pointe Brevoort, la vision à 360° en prend une saveur plus goûteuse. Vue grande ouverte du Viso au Mont-Blanc, du Mont-Rose au Ventoux ; on pourrait presque voir les Sucs ardéchois ! Nous redescendons retrouver nos skis et glissons en lisière droite du glacier pour profiter d'une légère moquette. Nous passons le col des Neiges et basculons sur le glacier de la Casse Déserte que nous dévalons jusqu'au pied de la brèche de Charrière : une neige de cinéma qui nous tire des cris de contentement. Des gamins, nous sommes des gamins tout heureux du plaisir que leur procure leur jeu ! A partir de Valfourche, le jeu est un peu moins marrant, alternant poussettes et pas du patineur. Sous le refuge de l'Alpe, nous rattrapons 3 skieurs qui chargent leur ski sur leur dos : descendants de la Grande Ruine, ils nous demandent si ces crampons nous appartiennent ? C'est sûr, la chance ne sourit qu'à la mauvaise graine ! Après moult remerciements, nous reprenons notre chemin alourdis des skis. En bas des Voutes, je croise le rocher rose de Taramont. Une pensée pour elle qui m'a précédé de quelques jours. Enfin, voici le pont d'Arsine.
Nous ne pouvons pas nous quitter sans marquer le coup. Notre équipée se finit avec délice au gîte du Pas de l’Ane où les pieds paquets du jour font la quasi-unanimité.
Ensuite débute le retour vers nos pénates. Passé Briançon (pour cause de fermeture du tunnel du Chambon), nous nous égaillons qui vers le tunnel du Fréjus, qui vers Gap, qui vers Sisteron.
Entre Montpellier et Béziers, je retrouve mes Pyrénées en apercevant la dent du Canigou dans les rougeoiements du couchant. Le reste de la route se fait de nuit.