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Sorties > Alpes Grées S > Grande Ciamarella, Face Nord

Grande Ciamarella, Face Nord ⭐⭐

Massif : Alpes Grées S
Départ : Bonneval sur Arc (1800 m)

Topo associé : Grande Ciamarella, Face Nord

Sommet associé : Grande Ciamarella (3676 m)

Orientation : N

Dénivelé : 1800 m.
Ski : 5.3

Sortie du vendredi 25 mai 2018

duve

Conditions nivologiques, accès & météo

Grand bleu
Etat de la route : Déneigée jusqu'au parking de l'Ecot Altitude du parking : 2000

Altitude de chaussage (montée) : 2000
Altitude de déchaussage (descente) : 2000

Activité avalancheuse observée : RAS

LieuAlt.Ori.HeureQté.TypeCom.
face Nord3676/3200N11h00Croutée finRares plaques de glace sous jacentes

Skiabilité : 🙂 Bonne

Compte rendu

Avec Alain Excoffier

FACE NORD DE LA GRANDE CIAMARELLA (3676m)
Le 25/05/2018. Alain Excoffier et Serge Duverney Prêt.
Difficulté de ski : 5.3 E2
Pente : 50º/55° sur 100, >45º sur 200m.
Itinéraire en aller/retour depuis l’Écot (Bonneval) : refuge et glacier des Évettes, col Tonini, face Nord Grande Ciamarella. Dénivelé : 1800m.
Superbe face glaciaire, objectif de choix pour le ski de pente raide mais conditions optimales conseillées : pour la descente, la glace nécessite d’être recouverte par la neige.
Historique :
Première ascension (directe centrale) : le 4 juin 1922 par E. Ferreri et M. Walter-Levi. Première descente à ski par Y. Anselmet dans les années 70.

En ce 25 mai 2018 après Jésus Christ, avec des températures avoisinant les 30ºc, toute la Gaule songe déjà à la farniente sur les plages de sable fin et aux eaux bleutées de la Méditerranée. TOUTE la Gaule ? Non ! Dans une petite vallée nommée Maurienne, 2 loustics résistent encore et toujours...

Apres 7 mois consécutifs à vadrouiller sur les sommets enneigés de la Savoie, nous n’avons toujours pas remisé nos planches au grenier et visons aujourd’hui un must en matière de ski-alpinisme : la face Nord de la Grande Ciamarella (3676m). Il s’agit d’une longue voie glaciaire, aux pentes extrêmes pour le ski, et qui présente les plus grosses difficultés que nous ayons connues à ce jour avec Alain.
Son accès s’effectue depuis le charmant hameau de l’Écot, à quelques encablures de Bonneval, en Haute-Maurienne. Ici, à 2000m, débute le sentier en direction du refuge des Évettes et des hautes cimes qui se dressent aux confins de notre belle Savoie. Si la sœur cadette, la Petite Ciamarella, se situe sur la ligne frontière franco-italienne, il faut faire une incursion en territoire italien, depuis le col Tonini, pour prendre pied sur le glacier qui climatise les pentes de la Grande Ciamarella. Cela fait plus d’un an que nous courtisons cette belle italienne qui a, par 2 fois déjà, repoussé nos avances. Mais les mauriennais sont du genre tenace et le réveil à 1h30 ne fut pas plus dur que les autres. C’est donc sans hésitation que nous avons pris la route de notre vallée de cœur, depuis Chambéry, dans le Panzer allemand d’Alain.
La Grande Ciamarella en aller/retour par le côté Nord représente une course d’envergure. La face striée par des barres rocheuses s’élève de 400m et l’inclination impressionne : rester concentré car la glace n’est jamais bien loin sous la neige et tenir la distance constituent les deux principales difficultés de cette voie sujette en outre aux brusques changements de temps du fait de sa situation géographique. N’oublions pas le franchissement de la rimaye qui peut s’avérer fastidieux par faible enneigement.

Le monde d'aujourd'hui est "verrouillé" par les normes, les standards. Il convient d’être "conforme" à ce que la société met en place. Il faut entrer dans le moule et ceux dont la tête dépasse s’exposent à la vindicte populaire et au jugement moralisateur. Alors, je ne peux m'empêcher la réflexion suivante : y'a t-il une raison raisonnable pour expliquer cette ascension et cette descente à skis dans une montagne dont l’impressionnante face Nord, ses barres rocheuses et sa pente inclinée à 50°/55° inciteraient plutôt le commun des mortels à tourner les talons pour aller siroter un café au refuge ? Pourquoi exposer ainsi nos corps bien frêles
Quelques éléments de réponse :

1- Un coup de cœur n'est jamais rationnel !
L’altitude, la raideur, l’esthétisme et l’envergure de cette face Nord font de la Grande Ciamarella une diva. Elle procure à l'alpiniste tout ce qu'il recherche. Ce qui est facile n'ayant pas de saveur, il se complaît dans la difficulté à vaincre, dans une forme de combat contre la nature. Cette longue voie glaciaire lui offre de beaux passages où il pourra mettre à l'épreuve sa technique et son physique, il devra faire preuve de concentration pour surmonter un danger qu'il sait présent.

2- Le pécher de gourmandise.
Le plaisir de monter, il faut l'avoir connu pour comprendre. Chaque pas enclenche l'irrésistible envie de monter plus haut et le bonheur éprouvé lors des précédentes ascensions pousse à vous élever à nouveau plutôt que de rester en bas de la vallée.

3- L’appel du virage sauté
En ski de pente raide, une image me revient souvent : au pied d’une face réputée difficile, c’est un mur et un monde minéral qui nous surplombent et, à l’inverse, une fois le point culminant atteint, on y voit un univers de blanc aiguisant l’appel du virage sauté.
En haut, le regard se pose sur une ligne fuyante, la concentration atteint son maximum. On se décroche alors de la paroi, skis aux pieds, pour un saut et un virage plongeant dans une pente vertigineuse. La première réception est cruciale, c’est elle qui donnera l’information sur la qualité de la neige. Si les carres mordent suffisamment, la confiance permettra d’enchaîner les virages. Si au contraire l’accroche des skis s’avère aléatoire sur une neige gelée ou, pire, si la glace vive menace dessous, la tension montera d’un cran et chaque réception nécessitera des appuis sûrs.

4- L’importance du duo. L’humain est fait ainsi : il va plus vite seul mais il va plus haut et plus loin à deux !
Le ski en pente raide est un sport qui flirte et prend place à côté d’autres activités qui se chevauchent : l’alpinisme technique, l’escalade sportive et le ski de randonnée, plus cool. L’engagement dans ces pentes fortement inclinées crée du stress mais le binôme que l’on a constitué avec Alain au cours de ces dernières années permet de mieux le supporter. Aussi, il nous serait inimaginable de nous engager seul dans de telles difficultés. À deux, tout est différent, le réveil est moins désagréable, l’approche moins prenante et la descente partagée apaise la tension morale. On se réparti ainsi la pression de la course entre nos quatre épaules.
Oui, notre duo fonctionne parfaitement et nous permet de franchir des paliers dans la difficulté.


Commentaires

gstephan, le 27.05.18 21:40

Superbe! La face est remplie comme il faut cette année! 😄

T
titoutim, le 27.05.18 21:43

Joligne ! Bravo 🙂 La neige a l'air bonne !

D
duve, le 27.05.18 22:12

Conditions optimales, neige conservée, skiabilité correcte dans cette piste noire foncée 😄

JulBont, le 28.05.18 18:38

Une pente qui me fait rêver. Veinards !!! 😎

T
titoutim, le 28.05.18 18:54

Finalement, le plus choquant, c'est l'expression "siroter un café" !!

D
duve, le 28.05.18 20:32

Y’avait Longtemps qu’on l’a matait cette belle italienne. On aurait été jaloux de s’la faire piquer ! 😄

P
pollo, le 29.05.18 09:42

J'ai regretté de ne pouvoir admirer la face il y a une dizaine de jours depuis l'Albaron.
Une superbe course avec un compte-rendu avec de magnifiques photos qui rend leur dimension humaine aux "mutants" du 5.x et fait l'apologie de la "cordée" (même sans corde !) et de sa dimension de partage.
Continuez à nous faire rêver avec de telles réalisations et de tels récits.

D
duve, le 29.05.18 16:44

Merci Pollo. 😉

M
marc, le 29.05.18 17:03

l'itinéraire est aussi beau que les photos et le récit.
Bravo !!

V
Vil'Brequin, le 29.05.18 17:48

Belle aventure très bien racontée! Bravo et merci pour le partage!

M
M31, le 29.05.18 18:11

joli!
la face avait l'air en poudre, c'est bien ca? avec une croute pas genante?
grosse épaisseu de poudre?
merci!

D
duve, le 29.05.18 18:42

M31 : poudre tassée légèrement croûtée. Quelques pièges demandent de la vigilance : rares plaques de glace sous jacentes et quelques requins qui affleurent. Mais globalement, la face est en bonne condition.

D
duve, le 29.05.18 18:43

Merci pour vos sympathiques retours.

P
p1p1, le 29.05.18 20:32

Je pense que c'est volontaire mais le début du récit ressemble sérieusement à la BD Silex and the City mais la suite non 😊 dommage pour la fin du récit mais cela ne retire rien à cette belle réalisation 🤣 🙄 😉
Je ne l'ai faite qu'en traversée (descente SO 🙂 )

F
floju74, le 29.05.18 22:41

Un kiff pour votre joli texte !

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