Départ : la Bérarde (1720 m)
Topo associé : Dôme des Ecrins, Traversée de la Brèche Lory
Sommet associé : Dôme des Ecrins (4015 m)
Orientation : T
Dénivelé : 2287 m.
Ski : 4.3
Sortie du dimanche 9 avril 2017
Conditions nivologiques, accès & météo
Nuageux puis ciel totalement bleuEtat de la route : noir
Altitude du parking : Berarde 1715
Altitude de chaussage (montée) : 2350m
Altitude de déchaussage (descente) : 2100m
Activité avalancheuse observée : RAS
Lieu | Alt. | Ori. | Heure | Qté. | Type | Com. |
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Berarde - Refuge | 2000 | W | 18h | Irrégulière | On chausse 50m avant le refuge, avant portage | |
Col des avalanches | 3500 | W | 5h | Vitrifiée | Regelée, avec un peu de vent, couteaux confortables | |
Brèche Lory | 3800 | W | 8h | Gelée | Neige dure et gelée en profondeur, accroche parfaite pour grimper | |
Dôme au col | 4000 | NW | 11h30 | Trafolée | Poudreuse trafollée *** | |
Col des ecrins | 3200 | W | 12h | Vitrifiée | Trafollée gelée, passage dangeureux | |
Retour Berarde | 2800 | W | 13h | Moquette | Moquette **** |
Skiabilité : 😟 Médiocre
Compte rendu
Avec Robin, Marius, Paul
« Merde, merde, merde »
Douce logorrhée qui résonne dans la vallée de la Berarde depuis notre échec cuisant de lundi dernier. Ne dormant plus depuis ce jour, la mousse au coin des lèvres et le regard vitreux, Robin rêve de ce Dôme des Ecrins qui l’a refusé trois fois cette saison. Il est nécessaire que le but devienne un essai. Transformé.
A la rescousse, on appelle Marius, sorti du BE de Moutiers qui prépare le diplôme de guidos (le pin’s lui fait beaucoup d’effet), et Paul, devenu vitrine des grandes marques de ski grâce aux contacts skipassiens … Une sacrée équipe de branque prête à casser du deniv, cette fois c’est la bonne !
L’ascension au refuge toujours aussi pénible, la neige fondue marécageuse en plus, deux chamois effarouchés et cinq allemands. Ah non ceux là ne font pas partie de la faune locale, ils sont de transit au refuge, mais ça reste impressionnant comme bestiole …
Echappée gastronomique dans ce merveilleux abri où il fait plus chaud à l’extérieur qu’à l’intérieur, « soupe lyophilisée en grumeaux » et « farfalles saupoudrées-renversées » (méfiez-vous des popotes à 11 balles du vieux camp ou vos plats auront un goût de sol de refuge). Robin prépare avec amour un sandwich qui ne finira pas de parler de lui ici « Vous verrez comme vous aurez la mort quand je le boufferai devant vous ». Les Allemands piquent les couettes pour faire des rideaux tandis que nos pieds restent humides et froids. Pas chouette
Le clair de lune excite les esprits et les corps flottent sur un tapis de neige crissante, sous un plafond limpide étoilé, trajectoire gérée au gré du gradient de pente. Pas un souffle, une lune paresseuse relègue les frontales au rang de petite tâche lumineuse … Le peloton d’ailleurs avance vite, et la corde de 50m pèse de plus en plus lourd. Je profite de cette nature si silencieuse, si belle pour engueuler Paul un bon coup et lui refiler sa corde !
La rimaille tant attendue se rapproche, et on se demande bien qui de nous quatre ira y déposer les reliquats de la soupe de la veille. Au final personne, je suis assez déçu de ne pas avoir pu tester un rappel un peu différent … L’ascension se déroule parfaitement, trace déjà faite, neige dure/glacée avec une accroche parfaite jusqu’au moment où..
« Merde merde merde et ***** ». Cri de désespoir de Robin qui vient de perdre un ami cher, son « friend », son coinceur qui se trouve très confortable au milieu du Lory et qui ne veut plus sortir de sa fissure. Etant le dernier, j’ai beau jouer avec le décoinceur, cette petite saloperie ne bouge pas d’un poil. J’ai l’impression de jouer à l’ostréiculteur qui veut décrocher la moule de son si tendre rocher. Mais à 3800 avec 100m de gaz derrière. Bref ça bouge pas, à bon entendeur, si vous le décoincez, vous seriez encore plus aimable de nous le ramener ! (Robin vous fera un sandwich)
Paul et Marius nous tracent une voie royale jusqu’au sommet, duquel on atteint rapidement le dôme, quelques couillonades sur les photos jusqu’à la redescente à nos skis laissés à la brêche, où l’on croise un pauvre hère, chargé de deux sacs. Bizarres dans le 38 … Aussi voit-on arriver son collègue hébété et titubant : « Mais va y, chauffe toi et monte les derniers 40m, t’auras la mort sinon ! » Je lance ça d’un ton enjoué, sans avoir vu qu’il avait déjà posé un renard à ses pieds …
On rejoint le Col des Ecrins, découverte du télémark à cause d’une chaussure en position marche forcée, les 3 s’agitent dans tous les sens pour poser le relais, et que je te fasse des blagues de guides et de grimpeur sur le nœud, et moi à côté qui regarde le vide et me demande si c’est vraiment la seule solution pour redescendre. Paul passe en mode chamois et se jette dans le rappel, Marius à ses trousses. Un petit regard larmoyant à l’attention de Robin qui lui a l’air de me dire « Mais ferme là t’es accroché comme un sauciflard y’a pas de risques ». C’est très rigolo au final, mais lorsque la zone de largage se fait voir, je découvre le sommet de la pente à largement plus de 45°, avec une poudreuse gelée croûtée. Quand on chausse alors qu’on est encore vaché, c’est que ça sent vraiment la chaussette.
Crampes de mises et fatigue montante, impossible de faire un virage sauté qui serait probablement loupé, avec que des conséquences positives. Un dérapage de débutant me traine aux 2 premiers déjà à l’abri plus bas dans le vallon, et Robin avec ses deux cordes nous rejoins avec les yeux qui pétillent « Avec tout ça, mon sandwich va passer un sale quart d’heure !! »
La journée se finit un peu sur les rotules, une petite moquette dans le vallon récompense nos efforts et nous libère quelques centaines de mètre au-dessus de la Bérarde. La voiture approche, délectation d’enlever son fardeau du dos, sauf pour Robin qui retourne complétement son sac et ne rigole plus du tout : « Les gars, je le retrouve pas, qui a volé mon putain de sandwich ??? »
« Merde, merde, merde ! »