Départ : Chamrousse (Le Recoin) (1650 m)
Topo associé : Traversée de Belledonne, Intégrale depuis Chamrousse
Orientation : T
Dénivelé : 5200 m.
Ski : 3.3
Faune : cet itinéraire passe près de zones sensibles. Voir consignes sur fiches topo
Sortie du lundi 13 février 2006
Jeroen, batime, Etienne-H-, marco, Nicolas, romu, TiBougnat, Tranquillo
Conditions nivologiques, accès & météo
Dimanche : Beau puis couvert dès 15h00
Nuit : Couvert, puis beau puis recouvert, puis rebeau
Lundi : Beau
Températures trés fraiches sous un vent de Nord plus que sensible.Etat de la route : Sèche
Altitude du parking : 2250
Conditions de neige : Globalement bonnes conditions pour la traversée.
Belledonne sud : peu de neige, ce qu'il y a est soufflé, cartonné, ou transfo regelé (bon grip)
Belledonne Nord : 20cm de poudre sur fond dur.
Skiabilité : 🙂 Bonne
Compte rendu (par Jeroen)
Je rentre rapidement la sortie, et je file me coucher...
Départ dimanche 13h00 de le croix de chamrousse (on a pris la benne). Une heure de retard sur le timing, normal on est 9...
Col de Freydane 15h30, 2h30 on a pas chômé.... Marco nous quitte cause le mauvais temps prévu est bien là : il ne le sent pas (et nous non plus d'ailleurs à ce moment là, le vent et le froid n'arrangeant rien)
Epaule du rocher de l'homme 16h45
Brèche de roche fendue 18h00, on traverse en descente (en masteurisant l'itinéraire) sous le pas de la coche 19h00. La nuit tombe et la visibilité reste trés correcte, malgré la lune voilée.
Col de la Vache 21h00, le ciel se dégage et on profite d'une belle descente
Col du mouchillon 22h30, aprés une superbe traversée des lacs
Refuge de la combe madame 23h00 (On avait initialement prévu Amiante > Rocher blanc mais les conditions de vent et de températures trés fraiches nous on fait renoncer). 10 heures qu'on est partis, il est temps de manger autre chose que des barres et de se reposer un peu. Petite pause de...
...3 heures, on repart à 2h00
Col du Tepey 4h30, froid.
Selle du puy gris 7h00 Aube, grosse montée assez raide, fallait pas zipper (casscroot au radar sur cette montée préfère descendre sur l'Oule pour se reposer un peu, B1)
Col du Villonet 8h50, le soleil nous a rattrapé.
Col de la lavoire 10h20 que du bonheur
Col du Golachon 11h30 ou l'on retrouve LE Frizz et LA Marinette.
Une bien belle aventure que ce voyage au bout de la nuit. Un groupe homogène nous a permis de terminer la traversée à 7. Physiquement, les derniers cols tirent sur les jambes mais le mental prend le dessus.
Quelques moments forts :
- la panne d'essence de Romu en venant au rendez-vous (B4v évité de peu!)
- Le skirandonneur dans la queue à chamrousse qui nous demande si on part faire les vans ou plutôt le Sorbier ;o)
- Romu toujours, qui manque d'arracher une carre dans la descente des Lacs Robert !
- le soleil de Casscroot oubliant qu'il n'avait pas ses fats
- Casscroot qui fait dodo sur la trace de montée
- le doute sous la Pas de la Coche quant à la couverture nuageuse
- Ti'bougnat marchant sur des Oeufs aux 7 laux. Vous croyez que ça va tenir ?!?
- la forme incroyable d'Etienne
- Le coup de déprime de Marco
- la glissade de Tranquillo sous la vache
- le vent glacial aux cols
- la poudre de belledonne nord
- L'optimisation de l'itinéraire
- les traversées de 5 km en neige béton
- le lever de lune sur les 7laux
- la descente en poudre du Mouchillon
- le balet des frontales à la descente du tepey et au mouchillon
- Jeroen, qui chippe des pâtes dans toutes les gamelles
- la sieste sur les tables du refuge de la Combe Madame
- Jeroen, qui chippe la couverture de survie de Nico au moment du dodo
- le lever du jour à la Selle du Puy Gris
- Frizz et Marinette au Golachon
[Edit] après une bonne nuit :wink:
L'histoire de ma traversée a commencée il y a déjà bien longtemps... La course de ces dernières heures n'est que la partie emmergée de l'iceberg.
Février 2004, une équipe de copains part pour la petite traversée. Je rate le coche, boulot oblige. Presqu'en même temps JDV fait sa traversée intégrale en solo. Chapeau le gars. Dès que les conditions sont réunies je me lance.
Hiver 2005, les conditions ne sont jamais là : le mauvais temps est de rigueur les jours de pleine lune.
Janvier 2006, J'enrage :x . Jip et sa bande de routards tentent leur traversée. Trop tôt je me dis. Trop froid en janvier. Le même soir on se fait avec Marinette et Frizz le grand colon en boucle et surprise : les conditions sont optimales (au moins au niveau des températures) si bien que la Jip's team réussi son pari. :lol:
C'est décidé, ce sera pour février, on poussera la chance :lost: .
Février 2006 : La pleine lune est prévue le 13 au soir. J'ai un créneau la nuit du 12. Les conditions annoncées sont presque parfaites (les températures risquent d'être un peu froides mais on gèrera ça au fur et à mesure). J'envoie donc l'invitation à mon carnet d'adresse et la sauce prend rapidement. On sera 9. Malgré l'équipe de tueurs, il me semble à ce moment là que 9 c'est beaucoup trop, on multiplie les risques d'échec. On en parle avec Etienne, deux groupes pourrait être une solution. Ti'Bougnat nous fait bien comprendre qu'il ne le souhaite pas. On reverra bien en fonction de la forme de chacun. ça se fera naturellement ou non.
12 Février 2006 : Rendez vous est pris à 11h15 à Routens. Le matin, coup de téléphone de Marco : La météo prévue n'est plus aussi bonne : il est annoncé couvert dès la fin de l'aprés midi. Je telephone à Ti'Bougnat pour prendre une décision. "On verra bien" me dit il. Soit, on verra bien. Qui ne tente rien n'a rien.
Romu gère comme un pro :cool: sa panne d'essence sur l'autoroute et ce n'est finalement pas lui qui est en retard au rendez-vous, mais bien nous. A 12h15 on est tous sur le parking du Recoin. L'excitation est palpable, les 24 dernières heures ont visiblement étés difficiles pour tout le monde. La tête a déjà commencé à travailler depuis longtemps. Quoi qu'on en dise, elle sera le nerf de la guerre qui s'annonce.
A 12h30 dans la queue des forfaits : "Vous aller faire les Vans ou le Sorbier ?" 8O . On aura du mal à lui faire avaler notre projet. Dans la benne on est surexcités. Les pistards ont du nous prendre pour des fous...
13h00 à la Croix, brrrr, il fait froid sous ce petit vent de Nord. La descente vers les Roberts commence et déjà les cuisses font mal. Mais ils vont comme des balles ?? La descente c'est pas mon fort (pour ça il faut des jambons comme dirait l'autre), mais c'est pas là que se jouera la réussite de la traversée...
Trés vite on colle les peaux et je prend le groupe de tête. Psychologiquement j'ai besoin de savoir que j'ai de la marge. Etre devant ça m'empêchera de trop penser. On suit une belle trace assez technique (surtout les descentes à peau) jusqu'à la Pra. La suite jusqu'au col de Freydane va nous apporter beaucoup de réponses sur la forme de chacun. Sous le col, la neige est dure et sans grip. J'espère que les conditions de montée seront meilleures sur la suite du parcours : en couteau on risque de perdre beaucoup d'energie.
On arrive au col et les derniers ne sont que 5 minutes derrière. C'est de bonne augure pour la suite. Je me dis que le challenge du groupe peut le faire. Au niveau du temps c'est pas le même optimisme : les prévisions de MF se confirment et le plafond nuageux cache entièrement le soleil. Dans ces conditions on ne verra rien cette nuit. Marco, qui ne le sentait pas dès le départ (et qui n'avait d'ailleurs pas pris le matériel nécessaire) décide de rentrer à Freydières :( . Cette affaire s'engage assez mal. Pour ne pas se laisser envahir par le doute, on décide de foncer. La descente sur le lac Blanc n'est pas trés bonne mais ce n'est pas la préocupation du moment. Est on en train de vivre les dernières heures de cette aventure ? on avance mais jusqu'où ? Personne à cette heure n'est capable de donner une réponse. Le groupe est soudé, c'est tout ce qui compte.
Courte remontée à l'épaule du rocher de l'Homme, toujours 2 groupes : Etienne, Nico et moi devant qui gérons l'avance, Casscroot, et Romu en chasse, Al, ti'Bougnat et Tranquillo forment le gruppetto, mais trés loin devant la voiture balais : on est en train d'exploser les horaires donc tout baigne.
La descente vers le col de la mine de fer n'est pas si mauvaise. La pente est assez raide, l'erreur technique de nuit n'est pas permise et risquerait de compromettre la suite des opérations.
Petit repeautage vers le col de la mine de fer puis vers la brêche de roche Fendue. On est en avance de 1h45 sur le timing. Le soleil est déjà trés bas et la nuit noire va bientôt nous rattrapper. Le doute s'installe. On est sur le point de non-retour : C'est maintenant qu'il faut décider : Soit on continue, soit on rentre sur Prabert. S'en suit une monstrueuse traversée descendante vers le pas de la Coche qui se termine à la nuit tombante. Les conditions de neige étaient parfaites et on a trés bien joué.
L'heure n'est plus à la discussion : Vu le froid qu'il fait on ne peut s'arrêter sans être frigorifié. L'objectif rocher Blanc ça sera pour la prochaine fois. Aujourd'hui on visera le col du Mouchillon puis le refuge de la combe Madame où l'on fera le prochain état des lieux.
La montée vers le col de la Vache est lonnngue. Le ciel est bien voilé mais la lune passe : la visibilité reste trés correcte. Il nous semble que le gruppetto nous suit de trés près lorsqu'on quitte l'itinéraire de la belle étoile. Finalement il n'était pas si près que ça et on attendra près de 15 minutes au col (et pas question de partir seuls devant : tout le monde a les ressources pour terminer donc on terminera en groupe). Le thé chaud fait un bien fou.
Le ciel est clair maintenant : On profite d'une super descente en poudre vers les sept laux. Sur les lacs l'euphorie est revenue : il fait beau, on est tous là. C'est sûr maintenant, le refuge est à notre portée. La remontée au col du Mouchillon est dure physiquement (pour moi en tous cas). On boucle déjà 2700m de montée, je commence à avoir vraiment faim. Les quelques substances energétiques que j'ai pu manger jusque là ne suffissent plus, l'eau dans la pipette (tuyau et poche) est gélée depuis longtemps : je n'ai bu qu'un litre d'eau depuis le début (et 0,5 litres de thé). Les jambes sont lourdes, il a fallu lutter.
La descente du Mouchillon est un festival : poudre à tous les étages. Casscroot tente même un jump sur le premier rocher (est-ce bien sérieux tout ça ?) et la chute est magistrale !
On passe au pied de tours dolomitiques mi ombre/mi clair de lune, c'est magnifique.
Enfin le refuge. On négocie 2h30 de pause (finalement ce sera 3 heures). Les pâtes font du bien, j'en chippe à toutes les tables :P . Le temps de refaire un peu d'eau et on se met en position horizontale une petite heure. Brrr qu'il fait froid. Nico se pointe avec sa couverture de survie (la mienne est restée dans mon sac) et je crois que je finis par m'endormir.
Le froid me réveille peu de temps aprés. 1h40 : Je n'ai pas du bien dormir longtemps. Il est temps de réveiller tout le monde. A ma plus grande surprise je ne me fais pas trop jeter, et à 2heures on est tous dehors pour la deuxième partie de notre folle aventure. Un voile d'altitude s'est de nouveau levé mais sans grandes conséquences.
Les jambes vont bien, même trés bien : la pause a été profitable. Comme le dit JVD cette montée est le crux de la traversée : 1000m faut pas flancher. On mettra 2h30, avec une fin assez pénible cause froid et vent + neige assez dure qui a rendue l'ascension technique. Glissade interdite.
Au sommet il ne nous reste que 630+510+330+120m : une broutille.
La descente vers roche Boucherin est fantastique : le ciel est à nouveau dégagé. La lune étant plus basse, l'ombre des sommets alentours est assez présente et les frontales sont de rigueur : c'est un ballet de petites loupiotes dans un cadre de rêve. Moments rares.
La montée vers la selle du Puy Gris est assez technique. La pente est toujours là et comme depuis le début de la nuit, il est défendu de s'en mettre une. Je sors donc les couteaux (seule fois de la traversée d'ailleurs) pour les 100 derniers mètres.
Cette montée sera fatale à Cassecroot : Déjà au radar sur la fin de la montée au Tepey, il s'endort maintenant sur la trace de montée et laisse finalement ses dernières ressources dans la fin de l'ascension. On a beau avoir essayé de le raisonner, il ne le sentait plus. Dommage :( car le plus dur était derrière lui.
On arrive donc à la selle à l'aube, la descente qui suit se fait sans les frontales, la neige est bien souflée : c'est pas du grand ski et de toutes façon l'heure est à l'économie : la descente c'est fait pour récupérer. Surtout ne pas se fatiguer.
La remontée vers le col du Villonet se fait en partie au soleil. Le groupe de tête a pris un peu plus d'avance que d'habitude : on sait que l'attente au sommet se fera au soleil et qu'on ne risque plus la pneumonie...
La montée vers le col de la Lavoire n'est qu'une formalité, on est presque au bout de la route. C'est encore un festival de poudre dans la combe des Reisses. Les 100 mètres pour le Golachon se feront ski sur le dos : il est encore tôt et la neige porte bien. Etienne a du faire ces 100m en 5 minutes, je vous laisse mesurer la pêche qu'il avait. On retrouve Frizz et Marinette au Col, venus spécialement pour nous encourager. Un grand merci, et aussi à Severine et Greg.
Le pari est réussi : 5200m en moins de 24heures (on en aura mis 22). Le tout avec une équipe de choc dans une ambience de folie. Merci de m'avoir supporté, mais vous saviez à quoi vous attendre :P
Je rejoins Etienne sur le notion de "hors du temps". La traversée n'est plus rythmée par les heures, mais par les cols qu'il faut franchir. Le cerveau (en tous cas le mien) ne se projetait jamais trés loin mais se fixait juste un objectif à courte échéance : le prochain col.
Globalement, ça a été moins dur physiquement que je ne l'avais imaginé. En se "calant" entre 8 et 10 m/min on ne fatigue presque pas, si on prend bien soin de s'hydrater (pas facile avec les températures qu'on a eu) et de se nourrir régulièrement.
J'ai du boire 2,5 ou 3 litres au total (je ne bois jamais trop). Par contre j'avais mis un peu de jus de raisin et de sucre dans ma pipette et j'ai l'impression que ça file bien la pêche. 10 barres, 2 bananes, pate d'amande. Quelques pates à la combe madame, plus un peu de pain et un morceau de fromage.
Inoubliable :happy: