Summit push incertain et poudreux à la Grande Ruine et Tour de la Meije

Massif : Ecrins
Départ : Villar d'Arêne (Pont d'Arsine) (1667 m)

Topos associés : Grande Ruine, Voie normale Grande Ruine, Tour de la Grande Ruine

Sommets associés : Brèche de la Meije (3357 m) Col de la Casse Déserte (3483 m) Grande Ruine (3765 m)

Orientation : T

Dénivelé : 4012 m.
Ski : 3.3

Conditions nivo et activité avalancheuse : RAS sur l'itinéraire malgré la chute de neige assez importante dans la nuit du 19 au 20 avec une bonne trentaine de cms au dessus de 3000 (manteau paraissant sain sous la Pointe Brevoort et la neige fraîche n'avait pas collé sur le couloir d'accès final) ; face W Casse Déserte,  accu assez importante au niveau des séracs main droite sens descente);

J1 (19/04) : montée ref Adèle Planchard

8h30 - 14h 

Portage 45 minutes jusqu’au plateau du plan de l’alpe. Quelques passages avec un peu de glace sur le chemin mais passe globalement super bien. Montée jusqu’aux pentes S sous le refuge sur neige dure et bon grip. Superbe ambiance en s'enfonçant S puis W sur le glacier de la Plate des Agneaux, les faces N de la Roche Emile Pic, de la Roche Faurio et de la Roche d'Alvau paraissent sacrément austères. Neige alternativement dure ou transfo entre la sortie du glacier (on oblique à droite pour remonter des pentes S) et le refuge. 

J2 (20/04) : Ref Adèle Planchard -> Grande Ruine -> col des Neiges -> col de la Casse Déserte -> Promontoire

7h30 - 16h30

Un passage de giboulées est annoncé pour cette nuit. 5/10 cm sur les bulletins météo, rien de très préoccupant donc. Réveil : 5h15, il neige bien et il y en a déjà 20/25 sur le banc devant le refuge... On se recouche une demie heure, puis on se lève et faute d'amélioration on prend notre temps au petit déjeuner et on discute des impacts sur les risques et sur le plan de la journée. La neige continue de tomber et la visibilité demeure très limitée. L’hésitation est collective. Moments suspendus. Autour de 7h, lasse des pourparlers et tergiversations, on décide de s’équiper et de partir en prenant le parti que le temps se lèvera, conformément au bulletin météo. 7h25 ski aux pieds sur la terrasse du refuge : on perçoit des premières trouées providentielles dans le ciel. On lève le camp, une cordée de 4 rocket man (qui nous avait doublé la veille en montant au refuge et qu’on retrouvera le soir au Promontoire - bonne continuation à vous les gars !) nous précède sans que cela nous gêne : il va falloir tracer dans 40 de poudre ! Le ciel ne tarde pas à se dégager. Le moment est féerique : la montagne est recouverte de neige immaculée, les nuages se déchirent autour des cimes, le vent fait tourbillonner la neige, le paysage avec la Barre et le Dôme se révèle. On a la sensation d’être au bon endroit au bon moment. Montée efficace jusque sous la brèche Giraud Lezin où on se fait cueillir par de violentes rafales de vent sur le haut du glacier. La cordée qui nous précède depeaute et descend ; on entend l'extase. On décide de finir de tracer la traversée et d'aller en découdre avec le vent sur l’arête sommitale. Les marches du couloir sont partiellement recouvertes mais la neige a été soufflée, c’est portant, ça passe bien. De violentes rafales sur l’arête finale et le sommet. On se fait secouer. Les condi sont presque hivernales. On ne traîne pas, bien que le point de vue sur les Ecrins soit somptueux. Rebuffat ne s’était pas trompé. 

Descente du couloir d’abord en désescalade puis droit dans la pente. Descente du glacier jusqu’au col des neiges dans 40/50 de poudre sur fond dur : on en a jusqu’au genou, c’est juste magique. On a conscience de l'unicité du moment et de la chance qu'on a ; on essaie de profiter de chaque instant. Descente du col des neiges à ski par le couloir à main droite ; neige très dure mais en dérapage ça passe. Remontée Col Casse Déserte nickel, bonnes marches des cordées précédentes. Descente en désescalade en tirant à main droite (dans le sens de la descente) : ça passe super bien. Rappel équipé à 5m à main gauche du col. Y’a sacrément de la neige comparé à l’année dernière ..! Descente jusque dans le vallon des Etançons sur neige alternativement poudreuse ou dure sur le haut puis majoritairement poudreuse sur le bas. C'est du 4*, on se régale ! Ça a été soufflé, les cumuls sont moins importants que de l’autre côté du col mais qu’importe, c’est le pied. Remontée vallon des étançons jusqu’au promontoire. Nombreuses coulées observées dans toutes les orientations. Quelle journée !

J3 (21/04) : Ref Promontoire -> brèche de la Meije -> Passage du Serret du Savon -> ref de l'Aigle -> pk

7h - 15h

Départ tardif pour boucler ce tour de la Meije. On est pas pressé et on laisse bon nombre de cordées partir avant nous. Remontée efficace à la Brèche de la Meije. Bonnes marches tout du long. Descente en désescalade (en tirant à main droite dans le sens de la descente) qui passe super bien. Descente puis remontée sur le glacier de la Meije sur neige soufflée. En N, ca caille ! Descente jusqu'au pied du Serret du Savon sur neige soufflée et parsemée de résidus de glace (sérac en amont) - pas bon. Passage du Serret du Savon : 15m en glace sur la partie basse, la majorité des cordées ont tiré une longueur (M3) - ça passe bien. Suite du couloir en neige qui se remonte bien. Traversée jusqu'au Ref de l'Aigle puis descente sur le glacier de l'Homme sur neige alternativement ventée / parsemée de résidus de glace sur le haut (2/3*) puis globalement transfo sur le bas (3/4*). Le cadre est encore une fois sublime : les séracs et blocs de glace omniprésents, on slalome entre eux sans trop s'attarder (descente à privilégier par bonne visibilité). Ambiance vraiment haute montagne. Pas besoin d'aller dans le MB pour vivre des expériences comme celle-ci. Descente à ski jusqu'aux rives de la Romanche que l'on traverse via une échelle. Retour voiture sous le grésil

Une bien belle boucle, de bout en bout, dans de superbes conditions!