Il y a encore quelques années la montagne était le lieu où les gens devaient composer avec une nature grandiose et impitoyable.
Economie de moyens, ingéniosité, connaissance de la terre et des cycles, travail exténuant, entraide, méfiance, la vie y était dure et la nature nous rappelait d'une année à l'autre, que rien n'y était acquis.
Je me rappelle de l'odeur des villages, du bois coloré par le soleil, de cette vie simple et compliquée à la fois, du cordonnier qui faisait des chaussures de ski en cuir à la main, du silence de l'hiver et du bruit de la fontaine, des rapports simples et de la méfiance de l'étranger, de l'effort et des petits bonheurs, de la richesse du décor et de la pauvreté du quotidien.
Cette vie existe encore dans quelques vallées. Dans des réserves.
Puis le merveilleux monde de la consommation s’est emparé de la montagne.
On consomme de la montagne, comme on épuise la mer. On prend, on détruit, on pervertit au titre de la liberté individuelle, du plaisir et de la consommation si importante pour la croissance. On ne va pas se gâcher la vie non ? La vie est si courte.
C’est le monde des compétitions, des stations bétons, des remontées mécaniques avec un bilan carbone positif, des transhumances des moutons RTT, de l’hélico qui est génial, de la Pierra Menta avec ses vrais sportifs, des autoroutes durables qui traversent les glaciers, des 3 escalades en 21Hrs avec salto arrière en parapente, du Mt Blanc avec EPO, du pecnaud avec ses belles chaussures de montagne en haut de l’aiguille du midi, de la pelle mécanique pour creuser des réserves d’eau, du Freeride tellement fun, et du Diamox, de l’alpiniste avec une belle quincaillerie neuve autours de sa taille, du saisonnier dans le Queyras qui vous affirme que la tartiflette c’est du coin, de ce tellement beau chalet à Megève fait ‘comme dans le temps’ (avec l’ours en peluche et le plaid en fausse fourrure), de Flaine et de Courchevel, bref c’est un peu vous et surtout moi.
Prenons des photos tant qu'il est encore temps.